Agir aujourd’hui pour mieux choisir demain – épisode 5 avec Bruno Cornillet

Agir aujourd'hui pour mieux choisir demain - épisode 5 avec Bruno Cornillet

Bruno Cornillet, équipier modèle de Bernard Hinault sous la Vie Claire puis de Greg Lemond nous démontre que la volonté peut soulever des montagnes. A l’âge de 32 ans, après avoir continué ses études en parallèle de sa carrière cycliste, Bruno est un parfait exemple de reconversion professionnelle. La transition du vélo au cockpit témoigne de la polyvalence et de l’adaptabilité de Bruno Cornillet.

Comme nous le savons, les Bretons et le cyclisme, c’est une grande histoire d’amour. Comment la tienne a-t-elle commencée ?

Je dois beaucoup à mes jambes, mais surtout à Ange Roussel. Il était le Conseiller Technique Régional breton. Il a formé les équipes de Bretagne amateurs. C’était très dur de passer professionnel. Une fois mon niveau de performance atteint, deux autres personnes m’ont propulsé vers le haut, c’est Paul Köchli et bien entendu Bernard Hinault. J’ai eu la chance de débuter en 1984 au sein de l’équipe La Vie Claire, ce qui m’a ensuite amené à faire 12 années en tant que cycliste professionnel. J’ai fini ma carrière en 1995. Lorsque j’étais amateur, j’avais une particularité. J’ai décidé de rester dans mon petit club de Lamballe, avec le président Eugène Rohon. Grâce au comité régional, j’ai pu garder la main sur mon planning, sans subir de pression malsaine des dirigeants intéressés par leur club, leur équipe, le niveau des meilleurs, car il ne faut pas être naïf, il y a que ça qui les intéresse. Par conséquent, sous prétexte de gagner 1000 francs par mois, je perdais mon âme, mon indépendance. Je me suis donc concentré sur les événements régionaux et nationaux.

Est-ce que tu avais quand même les études à côté ?

Quand Bernard Hinault vient vous recruter, c’est difficile de dire non, c’était mon rêve. J’ai décidé contre mon intérêt, d’arrêter les études. Je ne savais pas que c’était plus important de privilégier les études et surtout que c’est compatible, il suffit de s’organiser. Les études ne nuisent en rien aux performances sportives. Au contraire, je trouve que cela apporte un équilibre. Pour répondre à la question, je suis passé professionnel à l’âge de 20 ans, j’ai lâché niveau bac. Je n’ai pas eu d’enseignement supérieur. J’ai également mis de côté ma formation de pilote, car je me suis inventé de fausses excuses. Décision stupide, je reconnais. Mais le destin a changé, à 26 ans, j’avais mon plein potentiel cycliste chez les professionnels. Dans l’aviation, c’était une période où il y avait pas mal de recrutement, donc je me suis retrouvé face à un choix. Est-ce que j’arrête maintenant pour me consacrer au métier de pilote ou est-ce que j’allais au bout pour mettre de l’argent de côté et payer mes études. La carrière de cycliste professionnelle est très courte, à 26 ans on se croit au bout de sa vie, mais ce n’est même pas le début qui commence. J’ai continué mon métier de cycliste jusqu’à mes 32 ans, mais tout en continuant mes études en parallèle. J’ai passé mes certificats de pilote de ligne. Donc une fois à la retraite cycliste arrivée, j’étais déjà pilote de ligne professionnel. J’ai démarré à 34 ans, chez Regional Airlines.

Tu as eu une longue et belle carrière professionnelle. Est-ce que la reprise des études est rentrée en concurrence avec le cyclisme ?

Oui c’est rentré en concurrence à plusieurs reprises. Il ne faut pas se voiler la face, dès que les résultats baissent, tout de suite c’est parce qu’il pense aux études. J’ai trouvé le milieu assez rétrograde par rapport à ça et surtout pas intéressé par la dimension RSE. Après le vélo, après 25 ans de pilote chez HOP !, maintenant le groupe Air France j’ai réalisé que sans une volonté acharnée, je n’y serai pas arrivé.

Un très bon exemple de reconversion. Il est toujours possible de reprendre ses études, mais l’entourage à une grande importance.

Oui il faut bien s’entourer. Je me souviens de Bernard Hinault qui disait « si on veut, on peut ». C’est encore plus vrai en dehors du sport, car dans le sport, il faut prendre en compte le côté physique.

Tu as connu le vélo des années 90 et donc son évolution. Est-ce que tu peux nous parler de l’évolution de l’accompagnement scolaire des jeunes.

J’ai remarqué, qu’aujourd’hui les équipes professionnelles créent des équipes continentales. Les équipes continentales c’est aussi des pros mais des jeunes. Cette façon de faire c’est pour utiliser les jeunes comme barrière d’ajustement dans l’effectif professionnel sur les belles courses mondiales. Je trouve qu’il n’y a pas vraiment de respect envers l’individu, car il est envoyé faire de très belles courses, sans être prêt. La question d’avoir un planning adapté pour les études, je ne pense pas que ça soit l’intérêt du manager. Je vois ça comme la course à la poule aux œufs d’or. On le sait tous, un coureur comme Pogaçar ou Evenoepoel ce n’est pas 1 pour 1000. C’est-à-dire qu’il y a une majorité d’entre eux qui vont sacrifier leurs études pour faire plaisir à des marchands de rêves. On ne peut pas arriver à 35 ans sur le marché du travail sans diplôme, ce n’est pas possible de trouver du travail. Je fais un appel à tous les parents des coureurs. C’est au jeune de choisir son avenir et de le construire.

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